Artiste australienne vivant et travaillant à Paris, Julianne Rose fut modèle à l'âge de dix-huit ans, après avoir remporté un concours de beauté, avant de devenir photographe pour des magazines de mode et pour la publicité.
Alors se préparait son travail personnel, traduisant ses interrogations sur l'image de l'enfant et la représentation du corps dans les sociétés modernes ainsi que sur le rôle de la mode dans le développement de la personnalité de l'enfant. De même, elle présente une critique radicale de la société de consommation.
Dans l'exposition parisienne en 2006 The flesh and Blood Toy Store (le magasin de jouets en chair et en os), l'artiste confronte l'image de l'enfant à celle de la poupée. A l'observation de ces photographies, on peut se demander qui de l'enfant ou de la poupée, est le modèle de l'autre, dans une société où l'on souhaite ressembler à un modèle de beauté.
A propos de la collection Flesh and Plastics (2005-2007), extrait de la revue Eyemazing en 2008 : "Elle explore la marchandisation de l'enfant au service de la publicité faite par l'adulte, le paradoxe de l'enfant à la fois consommateur d'objets et enfant-objet, s'interrogeant sur l'utilisatiion de l'identité de l'enfant dans la publicité, dans la mesure où le consumérisme et la publicité standardisent les comportements individuels et les paradigmes de la beauté. La collection consiste en des diptyques qui juxtaposent l'image d'un enfant réel à celle de sa réplique en poupée. Dans chaque cas une dualité est créée : chair/plastique, réalité/rêve, vivant/non vivant. C'est une dualité à travers laquelle l'enfant apparaît (...) tout simplement transformé en un nouvel objet fétiche ou de consommation. En même temps, il est aussi un consommateur potentiel des jouets auquel il va inconsciemment chercher à ressembler."
"A travers le triptyque intitulé Singing Autoportrait - The world Survival Tour 1966-2006 (2006), se lève (...) l'élue "Australia's face of 85", Julianne Rose, qui a personnellement connu la gloire éphémère et vaine des concours de beauté, dont elle a vite compris l'idélologie aliénante : "Quand on t'appelle pour ta plastique,(...) on ne demande pas ce que tu as à dire...". D'où ce triptyque magistral dont la partie centrale figure l'artiste, buste ceint de l'écharpe gagnante plastifiée comme celle des poupées Barbie, contrastant avec un visage de quadragénaire outrageusement fardé (...) ; et dont les volets gauche et droit exhibent un corps de poupée en plastique aux piles ridiculement apparentes. Mais que l'on presse le sein droit et se déclenche le refrain connu de Gloria Gaynor," I will survive". Si l'on se prend d'abord à sourire, comme devant une installation ludique, très vite cependant les mots eux-mêmes font sens et modifient radicalement la perception du triptyque : I will survive. Quels que soient les outrages du temps, quelle que soit l'aliénation à laquelle vous soumettrez mon corps et mon identité, je me redresserai, la tête haute, légère, altière, souriante. Femme, enfin." (Dominique Baqué dans la revue ArtPress d'octobre 2006)
La collection Livedolls (2005-2009) illustre l'ambigüité entre l'être réel et sa représentation. Julianne Rose y présente des photographies de poupées qui ont des visages d'enfants, modèles de perfection faisant écho à cet idéal de beauté alimenté par les médias. Là encore, on est intrigué par l'esthétique à la fois parfaite et dérangeante de ces portraits. Les poupées, d'une sensualité déshumanisée, ont de beaux yeux et un teint de rêve. Alors surgit cette question : ces visions sortent-elles d'un catalogue d'enfants destiné à des parents obsédés de perfection ? Ou sont-elles des poupées vivantes ?
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